Fièvre, insuffisance rénale aiguë et gros reins : une infection à Hantavirus - 22/11/15
Résumé |
Introduction |
Les Hantavirus sont des virus à ARN responsables de zoonoses émergentes. Ils peuvent causer deux types de maladies chez les humains : la fièvre hémorragique avec syndrome rénal et le syndrome cardiopulmonaire. Plus de 40 espèces d’Hantavirus sont connues dont les virus Puumala, Dobrava, Saaremaa, Hantan, Séoul. En France, le virus Puumala est présent de manière endémique dans le quart nord-est (la Picardie, les Ardennes et la Franche-Comté) avec une moyenne annuelle de 89 cas par an. La sévérité du tableau clinique est déterminée principalement par l’espèce d’Hantavirus. En France, le virus Puumala provoque une forme atténuée de fièvre hémorragique avec syndrome rénal. La mortalité est inférieure à 1 %. En Asie, les tableaux de fièvre hémorragique avec syndrome rénal sont plus sévères avec une mortalité 5–15 %. En Amérique, d’autres Hantavirus provoquent un syndrome cardiopulmonaire grevé d’une mortalité de 40–50 %. Nous rapportons un cas auquel nous avons été confrontés récemment.Observation Un jeune homme de 35ans était hospitalisé pour fièvre évoluant depuis une semaine avec des arthralgies, des douleurs abdominales et des diarrhées. Il n’avait pas d’antécédent particulier. Il rapporte avoir coupé du bois en forêt dans l’Aisne 3 semaines auparavant. La palpation abdominale était douloureuse de manière diffuse et faisait suspecter une hépto-splénomégalie. La biologie montrait une insuffisance rénale aiguë avec une urée à 20,8mmol/L, une créatininémie à 516μmol/L. Il avait une leucocytose à 10 900/mm3, des polynucléaires neutrophiles à 7129/mm3, une hémoglobine à 14,3g/dL, une thrombopénie à 88 000/mm3, une cytolyse hépatique à trois fois la normale et une CRP à 118mg/L. La protéinurie était à 700mg/24h. Le sédiment urinaire montrait une hématurie microscopique à 90/mm3, une leucocyturie à 30/mm3, la culture urinaire était stérile. Les hémocultures étaient stériles. Les recherches d’anti-nucléaires, anti-ADN natifs et d’ANCA étaient négatives. Le scanner abdominal retrouvait une augmentation de la taille des deux reins mesurant en antéropostérieur 7,3cm à gauche et 6,5cm à droite, ainsi qu’une infiltration de la graisse péri-rénale et des fascias péritonéaux antérieurs. La sérologie du Hantavirus Puumala était positive. Le patient a été traité de manière symptomatique par hydratation intraveineuse et antipyrétique. Il s’est amélioré en en 5jours. La fonction rénale et les plaquettes se sont normalisées rapidement.
Discussion |
L’association d’une fièvre, d’un syndrome algique, d’une insuffisance rénale aiguë et d’une néphromégalie bilatérale a fait évoquer le diagnostic d’une infection à Hantavirus de type fièvre hémorragique avec syndrome rénal d’autant plus que le patient avait eu des activités en forêt dans une zone endémique. Le réservoir naturel des Hantavirus est un rongeur sauvage, communément le campagnol roussâtre. La transmission à l’homme se fait par inhalation d’aérosols de ses déjections contaminés. La période d’incubation va de 3jours à 6semaines. Il s’ensuit 4 phases : une phase fébrile qui dure 3 à 4jours comprenant une fièvre, un syndrome pseudo-grippal associant arthromyalgies, céphalées, douleurs abdominales et conjonctivite. La deuxième phase se manifeste par une hypotension artérielle avec des troubles hémostatiques, une hémorragie conjonctivale, des pétéchies ; le syndrome hémorragique étant moins important en Europe qu’en Asie. La troisième phase comprend une insuffisance rénale aiguë avec une protéinurie, une hématurie microscopique et une thrombopénie ; des manifestations extrarénales peuvent être y associées comme une un œdème pulmonaire lésionnel, une hépatite, une myocardite, un panhypopituitarisme ou des manifestations cérébrales. Le recours à la dialyse a lieu dans 0–6 % des cas lors d’infections par le virus Puumala et dans 16–48 % des cas lors d’infections par le virus Dobrava. Enfin, la phase de récupération, avec normalisation de la fonction rénale sans séquelle. L’imagerie abdominale peut montrer des gros reins, des épanchements péri-rénaux, abdominaux typiques des infections à Hantavirus. Le diagnostic repose sur la sérologie, actuellement il existe des tests rapides de dépistage des IgM permettant d’avoir une réponse en quelques heures. Le traitement est symptomatique.
Conclusion |
Les infections à Hantavirus sont des zoonoses transmises à l’homme par des rongeurs. Le diagnostic doit être évoquée devant une fièvre, une insuffisance rénale aiguë et/ou respiratoire selon les contrées. La prévention consiste à éviter l’exposition aux rongeurs et à leurs sécrétions.
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Vol 36 - N° S2
P. A120 - décembre 2015 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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